La situation grecque et le débat sur la burqa semblent a priori n’avoir aucun rapport. Et pourtant, l’un et l’autre renvoient à une grave pathologie dont souffre de plus en plus l’Etat moderne, et en particulier l’Etat français : Incapable de faire respecter les normes qu’il fixe, ni de lever les recettes dont il a besoin pour remplir ses missions, il ment à tout le monde, en produisant des textes inapplicables, et en distribuant de l’argent largement imaginaire.
Et, comme tout menteur, il finit par se mentir à lui-même : il devient un Etat mythomane, qui ne cherche surtout pas à savoir si ce qu’il dit est vrai.
Jusqu’à ce que la réalité le rattrape.
L’Etat grec, comme celui d’autres pays européens, dont la France, dépense beaucoup plus qu’il ne gagne, triche sur ses recettes et ses dépenses, ment à ses créanciers, à ses électeurs et à lui-même, finissant par croire qu’il a les moyens de ses folies. Jusqu’à ce que quelqu’un lui dise qu’il est ruiné et lui réclame la vérité, c’est-à-dire de l’argent réel.
De même, en France, à propos de la burqa : l’Etat veut faire croire qu’il entend légiférer pour faire disparaitre une pratique. En réalité, il n’a décidé de le faire que pour montrer à ses électeurs qu’il est de leur avis, tout en sachant fort bien qu’une telle loi sera vraisemblablement déclarée inconstitutionnelle et que, même si elle ne l’était pas, elle ne serait pas appliquée. Comme ne l’est pas, par exemple, la loi sur la polygamie, offense encore plus grave aux droits de la femme.
De même encore sur tant d’autres sujets, tels, par exemple, l’enseignement primaire, où on continue à prétendre que tout va bien alors que la France s’enfonce chaque année dans les profondeurs des classements internationaux.
Alors l’Etat, n’ayant plus les moyens réels d’agir sur le monde, se contente de produire des textes et de dépenser l’argent qu’il n’a pas ; tout occupé à mentir à lui-même et aux autres, il devient L’Etat mythomane. Et, comme tous les gens atteint de cette maladie mentale, il ment de plus en plus : L’inflation législative et le déficit public sont les formes que prend, en politique, le délire verbal du mythomane.
Pendant un temps, il peut le faire en toute impunité ; en tout cas aussi longtemps que les électeurs ont intérêt à flatter ce délire, auquel ils participent.
Puis, en politique, comme dans la vie privée, la vérité finit par reprendre ses droits. D’abord parce que le menteur se fait prendre au piège de ses mots : le mythomane, en multipliant ses mensonges, (c’est-à-dire, dans le cas de l’Etat, ses lois non appliquées et ses dépenses non financées) oublie le proverbe yiddish bien connu selon lequel « un bon menteur ne donne jamais de détail ».
Ensuite parce que l’Etat mythomane se fait prendre au piège de la réalité : à un moment, le citoyen se rend compte qu’on lui a fait des promesses intenables, qu’on lui verse de l’argent qu’on n’a pas, qu’on a fait des lois que personne ne cherche à faire appliquer. Il réalise alors qu’il a, face à lui, un grand malade, qu’il faut traiter comme tel. Qu’il ne sert à rien de l’insulter, de le maudire, de le traiter de menteur. Il faut seulement le mettre hors d’état de nuire. Hors d’Etat de nuire.
Et tant pis pour ceux dont la vie dépendait du mythomane.