Parmi les résultats imaginaires du G20 de Pittsburgh, il y a l’idée que le G8, réunion de riches, est enfin remplacée par un sommet plus légitime, parce que représentant l’essentiel de la production et de la population de la planète.
De fait, depuis des années, le G7 n’était plus que l’antichambre du G8, lui-même antichambre du G20; car les réunions au sommet des pays industrialisées étaient devenues l’occasion de rencontres pittoresques et vides de sens de mille et un chefs d’Etat et présidents d’institutions internationales.
De fait, le G20 , tel qu’il vient de s’installer est une institution très problématique: les chefs d’Etat y sont 27; l’ordre du jour y est impossible à établir et les discussions y sont impossibles à tenir dans un laps de temps aussi courts ; les points de vue sont si différents qu’aucun consensus ne peut émerger; de plus, dans cette réunion, l’Afrique sub-saharienne n’est pas représentée et l’Europe est formidablement affaiblie, par rapport à son poids au G7 et au G8.
Si on y prend les décisions importantes sur l’usage de l’aide au développement, sur la réforme des institutions internationales, le poids conjugué des Etats-Unis et de la Chine, conduira à chaque fois , comme on l’a vu à Londres (qui a exclu leurs paradis fiscaux de la liste) et à Pittsburgh (qui a pris à la seule Europe les quotas au FMI (Fonds monétaire international) nécessaires à l’Inde et à la Chine) à des décisions contraires aux intérêts de l’Europe
De plus, le G20 est une nouvelle instance informelle, alors qu’il existe une instance voisine formelle, celle du comité intérimaire du FMI, qui réunit 24 membres, et qui pourrait constituer naturellement la réalité de l’embryon d’une Organisation Mondiale de la Finance.
En fait, le G7, et le G8 conservent leurs utilités, au moins pour préparer la réunion du G20, pour harmoniser la position des pays développés, c’est-à-dire ceux qui ont quelque chose à abandonner, avant de rencontrer ceux du Sud, qui ont, eux, quelque chose à recevoir. Et s’opposer à cette réunion, à cette concertation des pays donateurs, conduirait aussi à refuser la concertation des Européens avant ces réunions, ce qui serait absurde.
De plus, la mise en œuvre des soit disant décisions prises sur les banques à Pittsburgh n’ont de sens qu’entre pays du G7, qui sont les seuls concernés par la finance spéculative; et qui doivent, entre eux, définir les conditions de mise en œuvre de cette harmonisation des règles comptables de leurs banques, et des règles de rémunérations de leurs traders. Si on ne le fait pas, ces règles ne seront jamais appliquées, pour le plus grand bénéfice des Américains et des Chinois.
L’équation est simple: le G20 est un G2 (Etats-Unis et Chine). Et ce n’est pas notre intérêt.
L’accepter, c’est accepter la dictature de l’image. C’est, pour le simple bénéfice rassurant d’une photo planétaire, permettre aux Américains de ne pas tenir leurs promesses, dans la connivence avec les Chinois, l’un ayant besoin de l’autre beaucoup plus que les deux ont besoin de l’Europe.
Il est urgent de dire non à cette manœuvre; ou au moins, puisque cela vient d’etre accepté, d’en tirer la leçon en proposant aux Chinois une réunion régulière entre l’Union Européenne et eux, juste avant le prochain G20; une réunion bien préparée. Il suffirait qu’on propose un tel «G2 bis» pour voir la colère que cela entrainera chez les Américains. Et comme souvent, quand les dirigeants américains sont en colère contre les Européens, c’est que ces derniers, pour une fois, défendent leurs intérêts.