Un joli proverbe oriental dit qu’il faut conduire un menteur jusqu’à sa porte ». Cette sage recommandation est fort utile tant dans la vie privée que dans la vie publique.
Ainsi, par exemple, des propositions du Front National, et de sa prétention récente à être désormais un parti sage et raisonnable, au programme applicable, utile au plus défavorisés, nuisible aux plus puissants et capable de protéger la France des malheurs du monde, et en particulier des vagues de migrants supposés venir anéantir notre mode de vie.
Tout, là-dedans, est illusion ; cette stratégie de la fermeture est totalement vaine. N’en prenons ici qu’un seul exemple, qu’on pourrait ensuite répèter à l’infini.
Longtemps, le Front National s’est opposé à l’abandon de la monnaie nationale et a plaidé pour le maintien du franc. Position parfaitement cohérente avec son isolationnisme : le non création de la monnaie unique aurait très vite conduit les pays membres du Marché « Unique » à constater que ce marché ne l’était pas, puisque chacun pouvait se concurrencer par une dévaluation. Et, de défaisance en défaisance, toute la construction européenne se serait défaite, pour la grande joie des nationalistes. Faisant perdre à la France le bénéfice du plus grand marché du monde.
Puis le Front National à inscrit dans son programme l’abandon de l’euro et le retour à la monnaie nationale. Enfin, devant le saut dans l’inconnu qu’un tel choix impliquerait, Marine Le Pen prétend maintenant que l’euro restera « monnaie commune «et que le franc redeviendra « monnaie nationale ». Et pour rassurer plus encore, elle explique qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter: « un franc restera égal à un euro».
Il est alors difficile de comprendre l’intérêt de cette nouvelle monnaie : si sa parité est indéfectiblement égale à celle de l’euro, le franc ne serait que l’autre nom de l’euro. Cela changerait quoi? Rien évidemment!
Poussée dans ses retranchements, Marine Le Pen explique maintenant que l’euro est surévalué, et que des produits évalués en francs, d’une valeur moindre, trouveraient plus facilement des clients. De plus, ayant notre propre monnaie, nous serions débarrassés des oukases de la Commission européenne qui prétendrait limiter nos déficits.
Raisonnement doublement absurde. D’une part, cela fait longtemps que plus personne ne respecte plus les soit disant diktats de Bruxelles. D’autre part, le franc serait nécessairement, et immédiatement, dévalué par rapport à l’euro.
Concrètement, cela voudrait dire que les comptes bancaires des Français seraient automatiquement libellés dans une monnaie dévaluée. L’épargne des Français perdra immédiatement une part importante de sa valeur. Pour l’éviter, il faudra ouvrir un compte en euro dans une banque étrangère, ce qui ne sera pas à la portée de tous les Français. Autrement dit, la mise en cause de l’euro ne profitera qu’aux plus riches.
A cela s’ajoute la dette publique: la part de cette dette libellée en euro deviendra plus coûteuse et les taux d’intérêt augmenteront. Il faudra, pour la payer, faire des économies infiniment plus sévères que celles que Bruxelles n’impose pas aujourd’hui.
Au total, consommateurs, épargnants, salariés, n’ont rien à gagner à la sortie de l’euro. La construction européenne est un progrès. Il faut en être fier et la défendre dans l’intérêt des prochaines générations.
Bien sûr, il ne faudra pas pour autant se contenter de la situation actuelle. Il faut en particulier réclamer à l’Allemagne de réduire ses excédents, pour aller vers une Europe plus équilibrée. Nous avons des arguments pour cela. Et c’est de cela dont nous devrions parler.