Etrange année que celle qui se termine. A priori, une année pleine de difficultés et d’échecs : la crise économique mondiale s’est approfondie tant en terme de dettes publiques que de chômage, même si les marchés financiers ont rattrapé une partie de leur chute. Des réunions internationales flamboyantes n’ont pas réussi à mettre en place le moindre commencement de gouvernance mondiale : deux réunions du G20 pour rien, sinon pour annoncer des mesures sans impacts réels sur la crise (paradis fiscaux, bonus des traders) ; un sommet de Copenhague pour le moins très décevant. Des élections européennes se sont tenues dans l’indifférence générale et sans projet. L’Iran a continué sans vergogne sa marche vers l’arme nucléaire et la répression de la démocratie, sous le regard désolé et impuissant du reste du monde.
Plus encore, même, 2009 fut une année porteuse de bien des menaces : Des banques centrales, même la FED, sont menacées dans leur solvabilité. Des monnaies, même l’euro, sont de plus en plus fragiles. Des fonds souverains, même celui d’Abu Dhabi, sont en péril. La Grèce, l’Espagne, la Grande Bretagne même, sont menacés de faillite, après l’Islande. 2010 verra certainement aussi l’intensification du processus de repli régional et identitaire avec la création en Inde, d’un nouvel Etat, le Telengana, qui risque de déboucher sur les revendications séparatistes d’autres régions indiennes. En Europe, les Catalans, qui viennent de procéder à un vote enthousiaste, bien qu’inconstitutionnel, en faveur de l’indépendance de leur province, pourraient remettre en question l’unité de l’Espagne. En Ecosse, en majorité travailliste, l’indépendance est également une option très envisageable à court ou moyen terme, surtout si les conservateurs remporteront les élections législatives du printemps. Par ailleurs, d’autres menaces pointent : l’AIEA annonce un pic de la production pétrolière dans les douze prochains mois. Cela accélérera aussi l’émergence d’un triptyque de pouvoir entre Russie, Inde et Chine, trois puissances nucléaires, ayant le contrôle de l’essentiel du gaz et de la dynamique de croissance mondiale, dont l’Europe est exclue. Divers conflits sont possibles, pour empêcher l’Iran de poursuivre l’enrichissement militaire de son uranium ou pour stopper le régime dictatorial de Corée du Nord, qui détient l’arme nucléaire. Et bien d’autres menaces se précisent, au Pakistan, et ailleurs, dans les mouvements de colère que la crise ne manquera pas de créer.
Et pourtant, je ne peux m’empêcher de regarder les mois qui viennent avec optimisme : La croissance économique est repartie dans les régions où vivent plus des trois quart de l’humanité. La ratification du traité de Lisbonne et la désignation d’un Président et d’une ministre chargée des Relations Extérieures donnent, malgré tous les doutes, une force nouvelle à l’idéal européen. Les armées américaines devraient quitter le sol irakien en 2010. En Iran, le mouvement de protestation pourrait déstabiliser le régime, de plus en plus isolé dans le monde musulman.
Enfin, et peut être surtout, il y eut, en cette année apparemment si sombre, de formidables progrès techniques, de magnifiques œuvres d’art, de sublimes preuves de solidarité, d’altruisme et d’amour.