Puisque désormais, s’amorce une gouvernance planétaire, il est essentiel d’en comprendre la logique. Et d’abord, d’en décrypter le processus de décision : Alors que, dans chaque pays démocratique, la majorité fixe la règle commune et que, dans les institutions internationales , ont été mis au point des procédures de vote très complexes où se mêlent, selon des recettes diverses selon les institutions, les exigences de souveraineté (un pays une voix), l de démocratie (un homme une voix) et de pouvoir (un dollar, une voix), dans le G8 ou, le G20, rien de tel : l’hôte propose un projet de communiqué qu’on doit approuver à l’unanimité.
Mais peu de gens se posent la question de savoir ce qui se cache derrière cette règle apparente : chacun des participants à t il un égal droit de véto, qui voudrait dire que le résultat de ces négociations ne pourrait etre que le plus petit commun dénominateur commun ? Ou bien les plus puissants peuvent-ils, implicitement ou explicitement, obtenir des plus faibles des concessions sur un sujet en se servant de moyens de pression sur d’autres domaines ?
En réalité, dans ce genre de réunion, fonctionne se joue une impitoyable bataille, dans laquelle les plus puissants l’emportent toujours : car seul peut s’imposer celui qui peut se permettre le luxe d’un échec de la réunion. C’est toujours le cas du plus fort ; beaucoup plus rarement celui d’un autre, assez désespéré pour prendre ce risque. De plus, le pays hôte est tacitement reconnu comme ayant droit à une récompense, sous forme d’une concession, au moins d’apparence, à ses intérêts électoraux. Et si l’hôte est aussi le plus fort, il écrase tout. A cela s’ajoute d’innombrables facteurs personnels, qui jouent vraiment dans ce genre de réunion : la compétence, l’ascendant, la capacité à proposer au bon moment un compromis évitant aux autres de perdre la face, tout en protégeant au mieux ses propres intérêts. Enfin, la maitrise parfaite de la langue anglaise, dans ces négociations éclairs, est essentielle.
On peut donc dire pratiquement d’avance le résultat de ces sommets : les Etats-Unis réussissent toujours à éviter la moindre décision qui nuirait à leurs intérêt ;les Britanniques, qui n’ont pas le même pouvoir, se concentrent sur la défense des intérêts de la City, et gagnent à tous les coups , aidés par les Etats-Unis ; les Allemands disposent de très peu de marge de manœuvre pour refuser quoi que ce soit aux Américains, sauf quand une alliance avec la France leur permet de proteger les intérêts de la zone Euro. Le Japon protège ses intérêts commerciaux. La France défend toujours en priorité son indépendance nucléaire, sa puissance agricole, et son pré carré africain, cédant souvent sur le reste. La Russie protège tout ce qui touche à sa souveraineté stratégique. Les autres, quand ils sont les hôtes (comme cela sera le cas de l’Italie pour le prochain G8) ont droit à un pourboire.
La réunion de Londres a donné un parfait exemple de ce processus : En menaçant de partir, le président français à fait comprendre qu’il était prêt à prendre politiquement le risque de l’échec, ce qui lui a donné un peu de marge de négociation. Mais pour l’essentiel, il était écrit d’avance que cette réunion allait protéger les intérêts anglo- saxons et chinois : leurs paradis fiscaux ont été protégés ; et les règles comptables ont été modifiées exactement comme l’avait souhaité le jour même la chambre de commerce des Etats-Unis, qui l’a imposé aux Congrès, qui l’a lui-même imposé aux régulateurs, qui l’ont soufflé aux négociateurs américains à Londres.
Si l’on veut que le prochain sommet du G20, (qui, comme par hasard, se tiendra à New York) ne soit pas joué d’avance, il serait essentiel de poser dès maintenant la question des procédures d’approbation des textes qui y seront discutés. Une question très mal polie…