Alors que le mur de Berlin est tombé et qu’ont disparu presque toutes les dictatures se recommandant de Karl Marx, la lumière doit être faite sur l’extraordinaire trajectoire de ce proscrit, fondateur de la seule religion neuve de ces derniers siècles.
Aucun auteur n’eut plus de lecteurs, aucun révolutionnaire n’a rassemblé plus d’espoirs, aucun idéologue n’a suscité plus d’exégèses, et, mis à part quelques fondateurs de religions, aucun homme n’a exercé sur le monde une influence comparable à celle que Karl Marx a eue au XXe siècle.
Il a vu avant tout le monde en quoi le capitalisme constituait une libération des aliénations antérieures, il ne l’a jamais pensé à l’agonie, il n’a jamais cru le socialisme possible dans un seul pays, il a fait l’apologie du libre-échange et de la mondialisation, et il a prévu que la révolution ne viendrait, si elle advenait, que comme le dépassement d’un capitalisme devenu universel. Il est le premier penseur « mondial », porteur de l’ « esprit du monde ».
Ce livre permet de comprendre comment ce jeune exilé allemand a pu rédiger à moins de trente ans le texte non religieux le plus lu de toute l’histoire de l’humanité, de révéler ses rapports singuliers avec l’argent, le travail, les femmes ; de découvrir un grand journaliste, un exceptionnel pamphlétaire, un immense théoricien ; de suivre un homme d’action orgueilleux et dictatorial. De réinterpréter ce XIXe siècle dont nous sommes les héritiers et de comprendre comment certains de ses successeurs ont créé nos démocraties pendant que d’autres, récupérant et distordant ses idées, en ont fait la source des deux principales barbaries de l’histoire moderne.
De réaliser enfin qu’aujourd’hui, au moment où s’accélère la mondialisation, qu’il avait prévue, Karl Marx redevient d’une extrême actualité.