Les Français vont renouveler dans 3 semaines leurs conseils généraux, dans des élections qui ne sont plus nommées (réforme majeure), « cantonales », mais « départementales ». Mais personne ne sait vraiment à quoi servira ce scrutin. Les Français connaissent leurs conseillers généraux ; ils savent vaguement ce qu’ils font. Mais qui est venu leur rendre des comptes ? Entend t on les partis politiques, de droite ou de gauche, d’extrême droite ou d’extrême gauche, expliquer ce qu’ils ont fait de leurs mandats ? Entend-on les partis expliquer en quoi leur gestion a été, ou sera, très concrètement différente de celle de leurs concurrents ? Qui leur a proposé des programmes ? Qui est venu leur dire : si je suis élu, voilà ce que je ferai ? Et surtout : comment ils utiliseront les milliards d’euros que leur fournissent les contribuables ?
Les seules choses dont on entend parler, à propos de ces élections, sont des sondages globaux, qui confirment le recul du parti socialiste, la montée du front national et surtout celle de l’abstention.
De fait, tous ces partis ne forment qu’un ensemble flou, unis par une connivence masquée, dans le désir constant de ne parler de rien, surtout de rien, sinon de la personne de ceux qui les dirigent. Et le Front national ne peut se prétendre extérieur à cette alliance du néant : lui aussi fait tout ce qu’il peut pour ne pas parler de son programme, sentant bien qu’il vaut mieux ne rien en dire pour attirer des électeurs et ne visant qu’à apparaitre comme un recours après l’échec de l’UMP et du FN.
En fait, tous ces partis forment ensemble une alliance qu’on peut nommer le « FNUMPS ». L’alliance de tous ceux qui veulent ne parler de rien.
Et pourtant, il y aurait bien des choses à dire : sur le rôle que le département joue aujourd’hui et jouera dans l’avenir dans le financement et la distribution des revenus minimas ; sur ses formidables gaspillages, en particulier par les recrutements injustifiés de centaines de milliers de fonctionnaires locaux; sur la mission qu’il devrait remplir, dans les années à venir, si on lui maintient la compétence absolument générale (autrement dit, le droit de tout faire) que le Parlement lui a attribué depuis deux ans, contre tout bon sens. Sur le rôle qu’il devrait cesser de jouer, quand on le supprimera, au moins en partie, pour confier ses responsabilités aux agglomérations (puisque c’est officiellement le projet du gouvernement, pour….après 2020..).
Mais de tout ne cela, pas un mot ! Par personne. Aucun parti n’en parle.
Peut-être peut-on au moins espérer que, puisqu’on va élire des gens pour des mandats dont on n’aura pas débattu de la mission, on admettra le moment venu qu’il est raisonnable de les supprimer.
Plus largement, tout cela est révélateur d’un dévoiement de la vie politique française, qui, si l’on n’y remédie pas, continuera lors des prochaines élections régionales : elles seront tout aussi vides de sens que les départementales. Alors que les régions portent, en théorie au moins, la responsabilité de l’essentiel des programmes d’infrastructures du pays et de la formation professionnelle, il est fou d’imaginer qu’on ne connait toujours pas le nom des têtes de liste des différents partis pour ces élections ; qu’on n’a aucune idée du programme qu’ils présenteront pour les six années de leur mandat. Et qu’il est clair que le FNUMPS se moque totalement de savoir quoi proposer de concret, région par région.
Le pays va mal. Il ne sait pas où il va. Il refuse même d’y penser, jusque dans les occasions les plus essentielles, les élections.
Alors, comme, à trois semaines des élections départementales, il est trop tard pour y remédier, je ne formule ici qu’un seul souhait : qu’en témoignage de protestation contre tous les partis, qui forment aujourd’hui le FNUMPS et refusent de remplir leur rôle, un maximum d’électeurs qui s’apprêtaient à s’abstenir, aillent voter. Blanc. En espérant que cela servira de leçon aux professionnels de la politique. En charge, même s’ils l’oublient trop souvent, de la survie de la démocratie.