Intégration: ce beau mot, qui renvoie à « intégrité » et à « intègre », semble banni du vocabulaire public. Personne ne se soucie plus d’intégrer dans la nation française ceux qui veulent lui apporter leurs forces et leurs talents. L’intégration n’est plus dans le mandat d’aucun ministre, ni d’aucune administration. Personne n’en a plus la charge. Aucun homme politique ne le reprend sérieusement dans ses discours, ni à droite, ni à gauche, ni aux extrêmes.
Ainsi, l’extrême droite ne veut pas entendre parler des migrants, et moins encore de leur intégration. L’extrême gauche pense, elle, que les migrants doivent rester ce qu’ils sont et ne pas se fondre dans un modèle ancien. Les partis de gouvernement, de gauche comme de droite, pensent que bien accueillir les migrants et les intégrer créerait un appel d’air et en ferait venir beaucoup d’autres.
On condamne donc ceux qui sont déjà arrivés en France et ceux qui vont y venir à une vie d’enfer, dans des squats ou des campements « durablement provisoires » et surtout insalubres, en se gardant bien de leur faire connaître leurs droits (à l’éducation, aux soins, au logements, à la régularisation). On transforme ainsi des villes, ou des quartiers, en lieux de mal-être pour leurs habitants d’origine, qui doivent côtoyer ces migrants dignes et désespérés venus du monde entier. Croire qu’en cachant le problème, qu’en refusant de s’en occuper, on le fera disparaître, ne fera en réalité que l’aggraver. Et les populations, laissées seules face aux migrants, se tourneront de plus en plus, excédées, vers le Front national, qui n’a pas plus de réponses que les autres.
Calais constitue le plus horrible exemple: une ville déjà pauvre, abandonnée par l’Etat, doit gérer, avec des moyens dérisoires, 7000, bientôt 10 000 migrants. Au moins 1 500 d’entre eux tentent certaines nuits de traverser le tunnel, pour atteindre ce qu’ils croient être le paradis britannique; parce que nul ne veut leur dire qu’ils ont beaucoup plus de droits de ce côté-ci de la Manche que de l’autre.
Quand mettra-t-on fin à ce scandale d’Etat? Quand cessera-t-on de consacrer des fortunes à se barricader, sans dépenser un euro pour accueillir dignement ces femmes, ces hommes et ces enfants? Quand fera-t-on ce qu’il faut pour fermer ces lieux de misère , non pas pour en recréer d’autres ailleurs, mais en intégrant ces gens dans nombre de nos villages, endroits magnifiques mais en voie de désertification, qui auraient tout à gagner à les accueillir? Il suffirait d’expliquer aux habitants et aux élus de ces communes comment faire, puis les aider à réaliser ce beau projet. Dans leur propre intérêt. En particulier pour y conserver tous les services publics. Encore faudrait-il bâtir, au niveau national, une politique, un discours, une vision, qui soit clair. Dans un sens ou un autre.
Aujourd’hui, il est donc urgent de choisir. Soit l’on ne veut pas de ces migrants en France et on les expulse, en les mettant dans des avions ou des bateaux pour les renvoyer vers la Syrie, la Libye, l’Erythrée ou l’Afghanistan, comme les Anglais et les Américains l’ont fait avec ces juifs allemands qu’ils ont renvoyés vers Hambourg en 1938; soit l’on applique la loi républicaine, comme elle est, et l’Etat français prend à sa charge un accueil digne et durable de ces migrants, en expliquant qu’ils apporteront au pays des emplois et de la croissance, tout en enrichissant l’identité française de leurs différences.
Le pire serait de ne rien faire. C’est pourtant l’attitude actuelle de tous les dirigeants politiques, qui creusent ainsi leur tombe. Ouvrant la voie a des extrêmes dont les solutions sont absurdes et indignes.
J’affirme ici, haut et fort, qu’il est de l’intérêt de la France d’intégrer ces migrants, comme il est de son intérêt d’être intransigeant avec eux, (comme avec tous les autres étrangers et tous les Français), sur le respect de toutes les exigences de la laïcité.
Il faudrait enfin avoir le courage de rappeler que la France doit autant à ses racines celtes et chrétiennes qu’au sang versé par les martyrs de l’Affiche rouge.