Une des raisons de la fascination qu’exerçait Mickael Jackson sur les foules, au-delà de son immense talent, tient à son obsession de devenir un autre et de rester jeune. Et c’est particulièrement en résonnance avec l’air du temps, dans un monde où toutes les populations, pas seulement celles des pays riches, vieillissent. Ou plutôt vivent plus longtemps. D’où ce désir de rester jeune, séduisant, actif, mêlé au monde. Etrange obsession, contradictoire avec le refus, si général aussi, de travailler plus longtemps.
Et pourtant, il faut affronter les faits : quand, dans les pays les plus avancés, l’âge de la retraite a été fixé à 65 ans, l’espérance de vie n’y était pas beaucoup plus élevée. Aujourd’hui, dans ces mêmes pays, on cesse de travailler avant 60 ans, et on vit 30 ans de plus. Evidemment, le financement de la retraite ne peut rester ce qu’il était. Il est même insensé qu’on ait laissé s’accumuler un tel décalage sans tenter d’y remédier, dans les deux modes de financement : par répartition et par capitalisation.
Le mode par répartition n’est plus équilibré : en raison du vieillissement et de l’effondrement de la natalité, il y aura bientôt de moins en moins d’actifs pour financer de plus en plus de retraités (2 pour 1, au lieu de 4 pour 1).
Le mode par capitalisation est aussi malmené par la crise financière, qui a fait perdre 20% de la valeur des actifs des fonds de retraites dans l’ensemble des pays de l’OCDE, soit 5,5 trillions de dollars. Même si cela n’a pas d’impact majeur, (puisque, pour la plupart des futurs retraités, la valeur de leur patrimoine aura le temps d’etre restaurée), la confiance en ce système n’est pas prête de revenir.
De plus, dans les deux systèmes, les retraités risquent de souffrir de l’accumulation des dettes des Etats, qui ne pourront etre remboursées que par l’augmentation des impôts et/ou l’inflation, qui dévaloriseront les placements des épargnants et les revenus des retraités.
Tout se met donc en place pour que les retraités soient les principales victimes de l’avenir. Pour l’éviter, il faudra accepter des reformes considérables, sans a priori idéologique.
D’abord, il faudra épargner plus, plus longtemps, et de façon plus prudente. Il faudra rétablir la confiance dans les fonds de retraite : l’expérience montre d’ailleurs qu’en moyenne, malgré la crise, la valeur de leurs actifs a augmenté dans le long terme de 7% par an, ce qui devrait permettre d’assurer durablement une retraite décente. Des fonds spécifiques, publics ou privés, en concurrence, devront etre développés, qu’ils soient ou non rattachés à des compagnies d’assurance. Leurs gestionnaires devront obéir à une charte très précise, les poussant à rester très prudents (en particulier pour le placement de l’épargne de ceux qui doivent partir en retraite dans les cinq prochaines années) et en ne participant pas au développement des produits structurés. Les entreprises vont devoir contribuer beaucoup plus à ces programmes, pour le compte de leurs employés.
Ensuite, la politique démographique doit etre revue pour faciliter la croissance du nombre d’enfants, et, (au moins en attendant que cette politique fasse effet), pour accueillir plus d’étrangers en âge de travailler et de cotiser.
Enfin, comme, l’espérance de vie en bonne santé augmente plus vite que l’espérance de vie elle-même, chacun doit avoir le droit de travailler, volontairement, sans limite d’âge et l’âge minimal d’accès à la retraite doit etre fixé en tenant compte de la pénibilité du travail et de la durée des cotisations.
Sans doute, un jour, pourra-t-on même imaginer une société où le travail sera si valorisant que la principale revendication sera d’allonger la durée du travail. On en est loin.